De Salomé Afolabi
La crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus a pratiquement affecté tous les domaines de la vie, et ceci, dans tous les pays. En Afrique de l’Ouest et particulièrement au Togo, la courbe des violences basées sur le genre est très ascendante. La question des grossesses précoces chez les adolescents en milieu scolaire et extrascolaire est d’actualité. Ce fait a été fortement accentué lors de la crise sanitaire au Covid-19 qui a conduit au confinement avec les fermetures d’écoles et centres de formations. Les adolescents ont davantage pendant cette période subi les effets du désœuvrement et le manque d’encadrement. L’éducation de la jeune fille se retrouve ainsi menacée par des grossesses précoces souvent recensées en milieu scolaire et extrascolaire.
La situation des jeunes filles et adolescentes au Togo constitue une préoccupation majeure pour les acteurs impliqués dans la protection des droits des jeunes filles et adolescentes car elles sont au quotidien exposées aux violences et exploitations de toute sorte.
L’année scolaire 2019-2020 a particulièrement connu un taux élevé de grossesses en milieu scolaire qui s’élève à 2298 cas selon la Direction de la Planification et de l’Education. La plupart de ces cas sont intervenus pendant les congés anticipés décrétés en mars 2020 en vue d’endiguer la propagation de la pandémie au Covid-19. Il a été enregistré environ 1222 cas de grossesses en 5 mois dont 559 cas dans les classes d’examen après la réouverture des classes en Novembre 2020.
Ce phénomène s’explique par :
Face à ce phénomène, les adolescentes sont confrontées à une multitude d’effets néfastes à savoir : risque pour la santé ce qui se traduit parfois par des fistules obstétricales. Aussi la déscolarisation, le rejet des parents, la perpétuation du statut inférieur des femmes et de la pauvreté sont entre autres des conséquences qui découlent de ce phénomène.
Afua élève âgée de 14 ans n’a pas pu réaliser ses rêves après sa grossesse. « Mon rêve était de devenir un médecin en pharmacie après mes études. Mais j’ai quitté tôt les bancs après ma grossesse. J’ai dû rester à la maison par manque de soutien parental. »
Quand à Sylvie, fille-mère de 12 ans à Kétao a eu des difficultés de santé après son accouchement. « J’ai eu un accouchement difficile vue mon jeune âge. Je n’arrive plus à marcher toute seule. Je me déplace parfois avec une canne, ce qui me rend la vie compliquée » raconte –t-elle.
Face aux grossesses et mariages précoces, l’État togolais a pris depuis plusieurs années des mesures juridiques et institutionnelles pour la protection de l’enfant en général et de l’adolescente en particulier. La société civile, les communautés et les partenaires techniques et financiers ont aussi mené des activités pour lutter contre ces deux phénomènes.
Parmi ces mesures, on peut citer :
L’Etat togolais a également mis en place un programme national de lutte contre les grossesses et mariages précoces chez les adolescentes en milieu scolaire et extrascolaire afin de contribuer à réduire de manière significative l’ampleur des grossesses et des mariages chez les adolescentes. Le gouvernement togolais s’appuie aussi sur les actions des organisations de la société civile en la matière sur le terrain.
On note entre autres actions : l’introduction des cours sur la sexualité et la santé sexuelle et de la reproduction dans le cursus scolaire, le renforcement de l’accès aux services de santé sexuelle et de la reproduction des jeunes et adolescents et la mise en œuvre du Programme national de lutte contre les grossesses et mariages des adolescentes en milieu scolaire et extrascolaire.
Face à la persistance et à l’ampleur du phénomène, ces actions doivent être soutenues et exécutées à grande échelle afin d’aboutir à un résultat satisfaisant.
L’association Petite Sœur à Sœur (PSAS), pour sa part, dans ses efforts pour permettre aux jeunes et adolescents d’avoir des connaissances en matière de santé sexuelle et reproductive, a initié le projet « Prévention de la violence sexuelle et basée sur le genre et renforcement de la santé sexuelle et reproductive et des droits des enfants et des adolescents au Togo » qui vise l’amélioration de la santé sexuelle et reproductive des enfants et des jeunes des régions de la Kara, Plateaux et Maritime (3 des 5 régions que comptent le pays) avec l’appui financier d’Action Medeor et du Ministère Fédéral Allemand chargé de la coopération économique et du développement (BMZ).
Dans le cadre de l’exécution de ce projet, l’association Petite Sœur à Sœur a continué dans la mesure du possible, ses actions pendant la période de confinement en mettant un accent particulier sur les mesures de prévention au sein des populations cibles. PSAS a de ce fait, formé des pairs éducateurs en milieu scolaire et extrascolaire (apprentis) pour mener des activités de sensibilisation sur les violences basées sur le genre et les grossesses précoces. Elle a aussi mis en place et formé des comités de protection des droits des enfants, des filles et femmes dans quatre préfectures au Togo pour mener des actions de prévention dans les communautés et assurer le référencement et l’accompagnement psychologique aux victimes. Elle a également organisé des tables rondes et journées de réflexion sur l’ensemble des problématiques à l’endroit des acteurs étatiques et de la société civile en vue d’aboutir à des approches de solutions innovantes. Des sensibilisations publiques et des émissions radiophoniques ont été et continuent d’être menées en vue d’éclairer davantage les populations, surtout les jeunes.
Ces actions de sensibilisation portent d’une part sur les questions de santé sexuelle et reproductive et d’autre part sur les droits humains (SSRD) et le phénomène des grossesses précoces en milieu scolaire et extrascolaire. L’association Petite Sœur à Sœur toujours à son actif, mène aussi des activités de sensibilisation sur la planification familiale pour la maitrise des questions de SSR et des sorties en stratégies mobiles au cours desquelles elle offre les services de diagnostic et traitement des infections sexuellement transmissibles, la planification familiale en vue de lutter contre les grossesses précoces.
Au-delà des actions de sensibilisation que mène généralement le gouvernement togolais, des associations, telles que Petite Sœur à Sœur (PSAS), appuient ces actions sur le terrain.
Ainsi, l’association PSAS dans l’optique d’autonomiser les jeunes filles vulnérables et d’améliorer leurs conditions socio-économiques, organise des activités de formation en GEC[2] (pour assurer un nouveau départ aux filles et jeunes femmes victimes) et d’initiation à l’autonomisation financière par des programmes de formation professionnelles et autres formations en AGR[3].
« J’ai réussi à réaliser ce dont beaucoup de filles rêvent au Togo. Après une formation professionnelle en coiffure, je suis aujourd'hui indépendante et peux même offrir à d'autres filles la chance d'un apprentissage. Aujourd’hui, j’ai ouvert mon atelier de coiffure et suis patronne grâce aux soutiens financiers et techniques de Petite Sœur à Sœur. » témoigne Nadège, âgée de 25 ans et patronne d’un atelier de coiffure grâce à l’association Petite Sœur à Sœur (PSAS) à travers sa sous-composante formation professionnelle en vue de donner une chance aux jeunes filles vulnérables de s'épanouir afin de mieux s'insérer dans la vie active.
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