De Nelly Staderini
Alors que la moitié des grossesses ne sont pas désirées dans le monde, cette proportion est encore bien plus importante dans des contextes de déplacement de populations. C’est pourquoi il est nécessaire de fournir une aide médicale d’urgence adaptée aux besoins des femmes déplacées de force.
Photo: Emergency shelter for women & kids
Julien Harneis / flickrLes Syriennes, qui avaient un accès relatif à des moyens de contraception et à un avortement dans leur pays, ont vu les choses se compliquer avec la guerre qui les a poussées à fuir, principalement vers les pays limitrophes absorbant jusqu’à présent le plus grand nombre de réfugiés.
Cette donne devrait changer pour celles qui arrivent actuellement avec la vague de réfugiés-migrants vers l’Europe et plus particulièrement vers l’Allemagne et les pays d’Europe du Nord puisque l’interruption volontaire de grossesse y est légalisée.
Il reste toutefois urgent de faire un diagnostic précoce de grossesse et de proposer aux femmes migrantes enceintes deux alternatives : suivi jusqu’à l’accouchement ou accompagnement pour celles qui décident de ne pas le mener à terme. Il est aussi urgent de mettre à disposition de ces femmes dans leurs déplacements des moyens de contraception et notamment une contraception d’urgence, ainsi que des préservatifs pour les hommes.
La prévention des violences sexuelles et des violences domestiques est un autre point crucial car une augmentation de ce type de violence est connue comme conséquence des conflits et des situations précaires dans lesquels les familles se trouvent transitoirement. Il y a aussi traditionnellement une non reconnaissance des violences conjugales avec une perception autour du devoir conjugal incluant des relations sexuelles désirées ou non.
Photo: A Syrian refugee and her newborn baby at a clinic in Ramtha, Jordan
DFID - UK Department for International Development / flickrEn Syrie, la césarienne est une pratique courante de plus en plus demandée par la population et répondant à des logiques commerciales. Ceci entraîne des grossesses ultérieures sur des utérus fragilisés nécessitant suivi et généralement une nouvelle césarienne. Un minimum de deux années entre deux grossesses est recommandé pour améliorer la survie de la mère et de ses enfants, ainsi que des moyens de contraception « longue durée », plus appropriés afin d’éviter des accidents de parcours tels les « oublis de pilules » récurrents. Les demandes concernant les stérilets sont courantes mais nécessitent une bonne information car beaucoup de fausses croyances sont véhiculées dans les communautés de réfugiés.
Les infections génitales sont très courantes pendant les grossesses, mais aussi en dehors de celles-ci et sont bien souvent dues à des mauvaises pratiques en matière d’hygiène, notamment lors des menstruations. L’information et le dépistage doivent être intégrés lors des consultations gynécologiques et obstétricales.
Enfin, bon nombre de femmes avaient coutume de donner du lait artificiel au nouveau-né et bien que les récentes années de conflit aient modifié ces pratiques, se traduisant par un perceptible retour à un allaitement maternel, les bonnes pratiques restent cependant méconnues. La peur d’infertilité et de prolactinémie entraîne également des sevrages précoces, malheureusement infondés. Le soutien à l’allaitement est ainsi important, comme la possibilité d’allaiter en toute intimité pour respecter la pudeur de ces femmes bien souvent voilées.
Enfin, la santé mentale n’est pas à négliger. Une écoute et un soutien notamment lors de la période de post partum sont importants pour permettre à la relation mère-enfant de se tisser de la meilleure manière possible, quand la perte de repères liée au déplacement pourrait la fragiliser.
G. Sedgh, S. Singh, and R. Hussain. Intended and Unintended Pregnancies Worldwide in 2012 and Recent Trends. Studies in Family Planning 2014; 45[3]: 301–314. https://www.guttmacher.org/pubs/journals/j.1728-4465.2014.00393.x.pdf