Intégration plutôt qu’intersectionnalité : ce qui est nécessaire pour une société inclusive
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Trois sur 246 : c’est le nombre de parlementaires suisses qui vivent avec un handicap. Certes, ce chiffre n’a jamais été aussi élevé. Cependant, si l’on considère que selon l’Office fédéral de la statistique, c’est 22 % de la population suisse qui est dans cette situation, on serait plutôt tenté de dire : « si peu », tellement les femmes politiques présentant une situation d’handicap sont fortement sous-représentées au Conseil national et au Conseil des États.


Il en va de même pour d’autres groupes sociaux, à commencer par les personnes issues de l’immigration. Alors que ces dernières représentent 41 % des personnes résidant en Suisse, elles se comptent sur les doigts d’une main au Parlement. Il semble que s’impliquer dans les organes politiques et participer ainsi à l’organisation de la société en tant que décideur·se·s soit difficile pour les membres d’une minorité. Les barrières linguistiques ou les salles de réunion non accessibles aux fauteuils roulants sont autant d’obstacles difficiles à surmonter ; sans parler des préjugés auxquels ils doivent faire face.

Foto: diva plavalaguna/pexels
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Le droit à la santé pour tous ne peut être garanti que si les personnes concernées connaissent le système de santé et que celui-ci leur permet d'accéder aux prestations médicales sur un pied d'égalité. Livia Kläui

Les personnes concernées font souvent l’objet de discriminations multiples

La discrimination (structurelle) touche les personnes pour différentes raisons, le plus souvent en raison de caractéristiques qui s’écartent de la norme supposée : par exemple la couleur de peau ou un handicap. Lorsque l’une d’entre elles présente plusieurs de ces particularités, elle est souvent particulièrement exposée à la discrimination sociale. Le terme d’intersectionnalité décrit l’interaction de plusieurs mécanismes d’oppression. Les personnes subissant ce phénomène d’oppression multiple sont souvent à la fois handicapées et issues de l’immigration. Le problème ne se pose pas seulement au niveau de la participation politique. Les barrières en matière de communication, par exemple, rendent difficile l’accès aux soins de santé. Or, ceux-ci sont souvent essentiels, en particulier pour les personnes handicapées.

Foto: jakub pabis/unsplash
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Migration et handicap : des obstacles à la participation

Handicap et migration sont donc deux notions susceptibles de se renforcer mutuellement lorsqu’elles se retrouvent dans le même contexte. Des données fournies par l’Allemagne montrent que l’interface entre handicap et parcours migratoire, ou exode, peut conduire à des déficits de participation. Souvent, les personnes concernées ne disposent pas de diplômes scolaires qualifiants : l’accès au marché du travail et/ou à une activité professionnelle bien rémunérée est donc plus difficile. Les conséquences ne se limitent pas à des difficultés financières. Des études montrent que le chômage et le manque de travail peuvent conduire à des dépressions ou autres maladies psychiques, voire les aggraver. Outre leur handicap ou de leur maladie chronique déjà présents, ces personnes se voient également « handicapées » par la société. Elles sont souvent exclues d’une participation sociétale. Par exemple, beaucoup de personnes handicapées travaillent dans des ateliers protégés, alors qu’elles auraient les qualités requises pour le marché du travail primaire. Certes, travailler sur le marché du travail secondaire procure un revenu et une structure. Cependant, les personnes handicapées s’y retrouvent souvent entre elles, ce qui va à l’encontre de l’idée d’une société inclusive. Pour leur part, les personnes issues de l’immigration subissent des discriminations (entre autres) lors de la recherche d’un emploi et/ou d’un logement. Outre ces inégalités, les personnes handicapées migrantes se heurtent par ailleurs à des obstacles très concrets. Par exemple, de nombreux centres d’accueil pour requérants ne sont pas suffisamment accessibles aux fauteuils roulants ou il manque des informations importantes en langage simplifié.

Afin de remédier aux préjudices subis par les personnes handicapées et issues de l’immigration, des améliorations sont nécessaires à différents niveaux. Le droit aux soins de santé est primordial. Ceux-ci doivent être accessibles sans obstacles. À cet égard, le travail d'information et de prévention est également important. Le droit à la santé pour toutes et tous ne peut être garanti que si les personnes concernées connaissent le système de santé et que celui-ci leur permet un accès équitable aux prestations médicales.

Livia Kläui
Livia Kläui est collaboratrice administration et communication chez Medicus Mundi Suisse. Auparavant, elle avait réussi un apprentissage professionnel d’employée de commerce CFC chez Unia Bâle. Elle a également étudié le journalisme et la communication organisationnelle pendant quatre semestres.