De Alexandra Nicola
Pendant longtemps, la violence obstétricale est restée invisible. Pourtant, elle dépasse en dimension de nombreuses autres formes de violence basée sur le genre. Une expérience positive de l'accouchement et l'absence de violence pendant l'accouchement sont des droits fondamentaux des parturientes. Et ils sont essentiels pour réduire la morbidité et la mortalité liées à l'accouchement.
La violence liée à l'accouchement, pour laquelle le terme anglais obstetric violence est souvent utilisé en allemand, n'est pas un phénomène nouveau ni lié à un contexte régional ou culturel particulier. En Suisse aussi, de plus en plus de femmes font état d'expériences traumatisantes pendant l'accouchement. Pourtant, il a fallu attendre le début des années 2000 pour que cette forme de violence basée sur le genre soit reconnue pour la première fois comme une forme de violence et fasse l'objet d'une attention.
Le Venezuela (2007) et l'Argentine (2009) font partie des premiers pays à avoir reconnu la violence à la naissance comme une violation des droits et à avoir commencé à la sanctionner. Ils ont été suivis par la Bolivie, le Panama et le Mexique. Presque au même moment, la science a commencé à s'intéresser au phénomène et a contribué à une compréhension plus approfondie et à la création d'une conscience de la problématique en générant des preuves.
La violence obstétricale englobe un large éventail d'actes ou d'omissions commis par le personnel médical dans le cadre de la grossesse et de l'accouchement, qui portent atteinte à la dignité de la parturiente et la privent de son autonomie quant au processus de naissance. Elle s'exprime notamment par des remarques dévalorisantes, des insultes ou des menaces pouvant aller jusqu'aux coups, par des interventions médicales inutilement douloureuses, par des traitements sans le consentement de la parturiente ou encore, très subtilement, par l'orientation du processus d'accouchement en fonction des intérêts du personnel de santé. S'il n'y a pas de possibilité pour la parturiente de choisir entre des positions d'accouchement ou d'avoir à ses côtés un∙e accompagnant∙e qu'elle a elle-même choisi, il s'agit également de violence envers les parturientes, tout comme toute autre forme de non-respect ou de non-prise en compte des besoins des parturientes.
La violence obstétricale englobe un large éventail d'actes ou d'omissions commis par le personnel médical dans le cadre de la grossesse et de l'accouchement, qui portent atteinte à la dignité de la parturiente et la privent de son autonomie quant au processus de naissance.
La violence en salle d'accouchement a des causes systémiques. Les approches qui attribuent les causes en premier lieu ou uniquement au personnel de santé sont insuffisantes, peu durables et généralement déplacées. Certes, il existe des cas de maltraitance et de violence obstétricales d'origine interpersonnelle. Mais en principe, les obstétricien∙ne∙s sont aussi des victimes : de conditions structurelles dans lesquelles il manque du personnel qualifié et en nombre suffisant, où leur rémunération ne tient pas compte de leur responsabilité médicale et sociale, ou encore où l'infrastructure et l'équipement des salles d'accouchement ne laissent aucune marge de manœuvre pour des accouchements autodéterminés. Et encore : Le fait que cette attitude soit largement acceptée comme pratique courante peut démoraliser les professionnels de la santé qui sont témoins d'une telle pratique de la part de leurs supérieurs.
Mais surtout, la violence obstétricale est l'expression et la conséquence d'un déséquilibre de pouvoir - entre le personnel médical et la parturiente. D'une part, en raison de la professionnalisation et de l'institutionnalisation de l'accouchement et de la hiérarchisation du travail de santé qui en découle. Mais surtout en raison d'un système qui attribue au personnel médical le pouvoir de décision et l'autorité sur le processus d'accouchement. Un noble objectif sous-jacent est de réduire les risques liés à l'accouchement. Mais cela s'accompagne d'une déshumanisation de l'accouchement, d'une perte de pouvoir des parturientes. Au lieu de s'orienter vers leurs besoins et leur bien-être physique et psychique, l'obstétrique sert ainsi à adapter les naissances aux idées, possibilités et directives d'un système.
Mais surtout, la violence obstétricale est l'expression et la conséquence d'un déséquilibre de pouvoir - entre le personnel médical et la parturiente. D'une part, en raison de la professionnalisation et de l'institutionnalisation de l'accouchement et de la hiérarchisation du travail de santé qui en découle.
Les relations de genre entrent également en jeu, en particulier là où l'obstétrique est dominée par les hommes. Et : la violence en salle d'accouchement est intersectionnelle : les jeunes accouchées, les accouchées de certaines origines ethniques ou socio-économiques, de certaines identités sexuelles, les accouchées célibataires ou physiquement limitées subissent plus de violence et de manque de respect de la part du personnel médical que la moyenne.
Les conséquences physiques et psychologiques de l'insertion des accouchements dans ce cadre prédéfini sont considérables et vont diamétralement à l'encontre de l'objectif noble de rendre l'accouchement plus sûr, au sens de « plus sain », en particulier là où les services médicaux d'urgence sont peu accessibles : Les blessures physiques et les expériences souvent traumatisantes incitent de nombreuses femmes enceintes à choisir délibérément de ne pas accoucher en institution. Elles acceptent de prendre des risques pour éviter d'être mal traitées et par des professionnels de la santé.
Pour que l'accouchement se déroule en toute sécurité et dans le respect de la santé et du bien-être des parturientes, des nouveau-nés et de leur entourage - même à long terme -, il faut donc un engagement clair en matière de violence obstétricale, dans le monde comme en Suisse, qui s'est engagée à lutter contre le non-respect des droits et la violence envers les femmes en signant la Convention d'Istanbul.
Pour que l'accouchement se déroule en toute sécurité et dans le respect de la santé et du bien-être des parturientes, des nouveau-nés et de leur entourage - même à long terme -, il faut donc un engagement clair en matière de violence obstétricale, dans le monde comme en Suisse, qui s'est engagée à lutter contre le non-respect des droits et la violence envers les femmes en signant la Convention d'Istanbul. Cela implique notamment :
En outre, il est essentiel que, dans le cadre de la formation du personnel médical, l'attention soit portée sur la gestion sensible de sa propre position de pouvoir. Si l'on est conscient de cette position de départ et que l'on agit dans un cadre qui reconnaît la responsabilité médicale et sociale du personnel obstétrical, il est possible de s'engager en faveur d'une collaboration en salle d'accouchement, qui redonne aux parturientes l'autonomie et le contrôle sur le processus d'accouchement et qui fait de la naissance une expérience positive.