By Bernard Borel
La Conférence de l'OMS en 1978 de Alma-Ata a consacré l'idée que les soins de santé primaires constituaient l’approche adéquate pour atteindre l’objectif de santé pour tous d’ici l’an 2000. Sur le modèle des « médecins aux pieds nus » chinois, la présence de « promoteurs de santé » issus des communautés et avec une formation minimale essentiellement basée sur la promotion de la santé et la prévention primaire, mais également axée sur les principales pathologie a été encouragée par l'OMS. C'était déjà à l'époque la reconnaissance que la santé ne dépendait que de manière marginale d'un système de soin optimal (on parlait alors d'à peine 15%).
Par la suite, beaucoup d'études ont permis de mieux définir ce qui influençait le plus sur la santé des populations, et a abouti à la charte d'Ottawa qui a bien défini les conditions-cadres pour une meilleure santé :
C'est cette approche qui a permis de définir toujours mieux ce qu'on appelle les déterminants de la santé qui doivent servir ,en principe, à toute analyse et intervention de santé publique visant à améliorer la santé des populations ici et ailleurs (même si nous savons tous combien cette approche rencontre des résistance quand elle se heurte à des intérêts économiques, comme en Suisse la lutte contre le tabagisme, mais c'est un autre débat). Elle marque toujours l'action de l'ONU-OMS dans ses objectifs de développement durable ODD) à atteindre d'ici 2030, auxquels se sont rajoutés l'idée de préservation de l'environnement (dont la destruction par l'action humaine est plus évidente aujourd'hui que jamais), et l'importance de l'égalité des sexes.
C'est cette approche qui a permis de définir toujours mieux ce qu'on appelle les déterminants de la santé qui doivent servir ,en principe, à toute analyse et intervention de santé publique visant à améliorer la santé des populations ici et ailleurs.
Ces principes posés, leur application dans la réalité est un vrai défit et force est de constater que l'on n'atteindra pas les objectifs des ODD à la date espérée, ni d'ailleurs celle de la réduction des gaz à effets de serre, encore moins celle de l'élimination des pesticides dans la production agricole, malgré leur effet nocif démontré sur la santé des population (voir la prolongation de l'autorisation du glyphosate en Europe encore pour 10 ans récemment proposée par la Commission Européenne).
Cela n’empêche pas des projets de santé
de s'inspirer de ces principes pour promouvoir, avec les
« bénéficiaires » des projets de santé global, comme un combat essentiel
pour plus de justice sociale, de solidarité et de respect à la «Tierra
Madre ».
C'est sur la base de l'analyse des déterminants sociauxde la santé que MTM a défini son accompagnement de communautés indigènes du Chiapas, avec la conviction que la tâche est si grande qu'elle ne peut être menée que par des groupes organisés et prêts à défendre leurs droits à la santé, mais aussi à y travailler collectivement. Il faut savoir qu ces communautés vivent souvent sur terres récupérées à de grands propriétaires terriens suite à l'insurrection zapatiste de 1994 qui ne sont de loin pas toutes légalisées.
Doit-on rappeler que les zones rurales du Chiapas (et même toute la zone proche de la frontière avec le Guatemala, bourgades comprises) sont la proie de lutte entre 2 clans de narco-trafiquants et que l'insécurité est réelle actuellement et complique le transports des personnes mais aussi des matériaux et encore plus des produits de la terre, alors que ces communautés sont essentiellement agricoles (et hélas souvent dédiées à une seule culture : café, canne à sucre, maïs aussi citriques qu'elles doivent écouler). Elle n'ont souvent pas accès à l'eau potable, n'ont pas de latrines et cuisent les aliments encore sur des feux ouvert. S'il n'y a pas de dénutrition grave, il y a une malnutrition liée à un apport nutritionnel déséquilibré avec trop de sucre et pas assez de protéines.
C'est dire que l'insécurité alimentaire est plus qualitative que quantitative. Heureusement il existe encore des collectifs, issus des combats historiques, mais émoussés par le manque de perspectives d'amélioration de leur conditions de vie sur place (et donc la tentation d'émigrer des jeunes aux États-Unis est très grande).
C'est sur ces constats que MTM (avec un grand soutien de la Fédération Genevoise de coopération) a monté 2 projets qui ; dans la réalité ; sont totalement imbriqués ; à savoir :
C'est sur la base de l'analyse des déterminants sociauxde la santé que MTM a défini son accompagnement de communautés indigènes du Chiapas, avec la conviction que la tâche est si grande qu'elle ne peut être menée que par des groupes organisés et prêts à défendre leurs droits à la santé, mais aussi à y travailler collectivement.
Ces promoteurs sont choisis par les communautés et ils ont pour tâche, avec la participation des populations concernées, des activités pour lesquelles ils ont été formés. On doit tenir compte aussi des besoins exprimés par les-dits « bénéficiaires », qui souvent n'ont pas les ressources monétaires pour s'acheter le minimum, ce qui, évidemment, est un facteur défavorable à la santé.
D'où l'idée de trouver des « activités génératrice de revenu(AGR ) » que beaucoup d'ONG ont, tout comme MTM intégrés dans leur programme. En l’occurrence, profitant de la beauté de la nature où vivent la plupart des communautés accompagnées par MTM, de petits centres « d'éco-tourisme » locaux ont été créés où. pour une modique somme, les populations des alentours peuvent venir et profiter de manger ce que les familles ont préparés, avec des aliments de leurs production, sans agrochimiques et sans boissons industrielles. Tout ceci représente un changement d'habitude car parallèlement, la population locale aura construit des toilettes sèches, des fours à pains, des cuisinières à bois fermées (qui évitent la fumée passive et diminue la consommation de bois), aura installé un filtre à eau et peut-être déjà planté quelques arbres fruitiers et des légumes dans son patio, selon la technique éprouvée sur une parcelle de permaculture collective.
Parfois même elle aura pu améliorer ou même construire sa maison pour mieux résister aux intempéries (en principe avec des matériaux locaux). Il faut aussi chaque fois penser à l'eau si nécessaire à la santé : faut-il creuser un puits, ou tirer des conduites depuis une sources ? Faut-il construire un château d'eau et ou collecter l'eau de pluie (en particulier des toits) ? Et tout cela avec l'aide des promoteurs locaux formés et l'équipe technique de MTM composée de formateurs sociaux, mais aussi de formateurs en bâtiment ou en permaculture et en santé primaire.
Ces promoteurs sont choisis par les communautés et ils ont pour tâche, avec la participation des populations concernées, des activités pour lesquelles ils ont été formés.
Écrire un projet de santé globale n'est pas si difficile mais sa réalisation est souvent plus lente que prévu, surtout si l'on veut que la population se l'approprie, ou mieux encore, qu'elle en soit l'initiatrice. Cela ne peut pas être un soutien individuel, mais bien le fait d'une communauté organisée, puisque les enjeux dépassent largement les besoins de chacun. Tout cela prend du temps que l'on doit tous accepter, y compris les bailleurs qui trop souvent veulent des résultats mesurables après 2 ou 3 ans.
En effet, il faut, hélas, aussi compter avec le fait que le promoteur choisi finalement n'en peut plus de sa situation de pauvreté et décide de tenter sa chance en migrant (comme tant d'autres au Chiapas), que l'insécurité si présente dissuade les gens de profiter de petits nouveaux lieux de détente crée (et donc perturbe les AGR), ou que l'organisation communautaire présente des failles, ce qui ralentit les activités, ou encore que les professionnels-formateurs restent trop dans une attitude « académique » ou n'ont pas toujours les compétences voulues (en particulier dans le domaine de la permaculture, encore si peu répandue dans le Chiapas et pas enseignée dans les écoles d'agriculture!). Sans compter que la situation d'insécurité rend la supervision du travail des promoteurs plus difficile. Il doit perpétuellement avoir des réajustements.
C'est la vie réelle et cela ne doit étonner personne. Il demeure que le travail de MTM est exemplaire. On voudrait que MTM ait encore plus de soutiens, pour que les communautés et les jeunes aient une autre alternative que la migration ou la délinquance :c'est la motivation pourperpétuellement remettre l'ouvrage sur le métier en sachant qu'un autre monde n'est possible que en le construisant ! C’est un leitmotiv répété régulièrement au sein de MTM.
Écrire un projet de santé globale n'est pas si difficile mais sa réalisation est souvent plus lente que prévu, surtout si l'on veut que la population se l'approprie, ou mieux encore, qu'elle en soit l'initiatrice. Cela ne peut pas être un soutien individuel, mais bien le fait d'une communauté organisée, puisque les enjeux dépassent largement les besoins de chacun.