Von Engelbert Manga und Beat Stoll
Le Cameroun, pays d’Afrique centrale en voie de développement a mis en place sa stratégie sectorielle en 2001 pour la période 2001 – 2010. Cette dernière était essentiellement axée sur les programmes de santé.
Après une évaluation faite en 2006, on s’aperçoit de la faible prise en compte
du renforcement du système de santé. C’est ainsi que la stratégie sectorielle
a été réorganisée en considérant :
- l’ancienne stratégie sectorielle
- les objectifs du millénaire pour le développement et
- le renforcement du système de santé par la viabilisation du district santé.
Le système de santé au Cameroun est organisé en trois niveaux. A chacun des
niveaux correspond une structure administrative, une structure de soins et une
structure de dialogue. La structure de dialogue ici correspond à l’organe de
représentativité des communautés pour le partenariat communauté services de
santé.
Le tableau ci-dessous résume les différents niveaux, les structures administratives,
de soins et de dialogue correspondantes et leurs compétences.
Niveau |
Structures administratives |
Compétences |
Structures de soins |
Compétences |
Structures de Dialogue |
Central |
Services Centraux du Ministère de la Santé Publique |
Elaboration des concepts, de la politique de santé, des stratégies, coordination, régulation |
Hôpitaux généraux de référence, Centre Hospitalier universitaire, Hôpitaux centraux |
Prestation des soins tertiaires et quartenaires, Formation, Recherche référence aux HP, HPA et HD |
Conseils d’Administration et Comité de gestion |
Intermédiaire |
Délégations provinciales |
Appui technique aux districts de santé |
Hôpitaux Provinciaux et assimilés |
Prestation des soins secondaires, Recherche référence aux HD |
Fonds spéciaux provinciaux pour la promotion de la santé |
Périphérique ou opérationnel |
Fonds spéciaux provinciaux pour la promotion de la santé |
Mise en œuvre des programmes |
HD, CMA, CSI, |
Référence aux services de santé du 1er échelon (HD), SSP |
Comité de santé du District, Comité de Santé |
HP: Hôpital provincial; HPA: Hôpital provincial assimilé; HD: Hôpital de district; CMA: Centre médical d’arrondissement; CSI: Centre de santé intégré;SSP: Soins de santé primaires |
Le secteur de santé ainsi décrit comprend 4 sous-secteurs qui assument les
attributions correspondant à chaque niveau.
1. Un sous-secteur public
2. Un sous-secteur privé à but non lucratif (pour la plupart les institutions confessionnelles)
3. Un sous-secteur privé à but lucratif (essentiellement les cliniques privées en milieu urbain)
4. Un sous secteur de la médecine traditionnelle.
La stratégie sectorielle actualisée du Cameroun met l’accent sur l’autonomie, la viabilisation du district de santé avec l’idée qu’il sera plus à même d’apporter des solutions aux problèmes de santé de ses communautés et atteindre ainsi plus facilement les objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Sur cette base, la stratégie est divisée en quatre domaines d’intervention
dont trois concernent les prestations visant l’atteinte des OMD et la quatrième
concerne le renforcement du système de santé. Ces quatre domaines d’interventions
sont :
- Domaine 1: Santé de la mère, de l’adolescent et de l’enfant
- Domaine 2: Lutte contre la maladie (VIH-SIDA, malaria, tuberculose, etc.)
- Domaine 3: Promotion de la santé
- Domaine 4 : Renforcement du système de santé au niveau ses districts
Chacun des trois domaines d’intervention concernant les prestations est divisé
en sous domaines puis en interventions prioritaires et chaque intervention prioritaire
est déclinée en résultats attendus par niveau et par structure.
En ce qui concerne le quatrième domaine concernant le renforcement du système,
il est divisé en classes puis en catégories d’intervention et les catégories
d’intervention sont déclinées en résultats attendus par niveau et par structure.
Cette organisation a pour conséquence que chacune des structures du système
de santé tel que décrit plus haut (public et privé) connaît ses résultats attendus
et peut faire son analyse situationnelle et sa planification en fonction de
ces résultats.
Pour l’application de la stratégie sectorielle ci-dessus décrite, le district santé est considéré comme le niveau opérationnel où les activités de prestations et de renforcement du système sont mises en œuvre pour l’atteinte des OMD. Pour y arriver, trois stratégies sont identifiées :
La planification et la budgétisation intégrées tenant compte des résultats attendus par domaines d’intervention de la stratégie sectorielle.
La mise en pratique du partenariat pour l’offre des soins avec:
- Les services de santé publique
- Les services de santé privés
- Les représentants de la communauté (comités de santé, groupe de patients,
etc.)
- Autres intervenants (ONG, partenaires nationaux et internationaux).
L’organisation de la mise en œuvre des interventions dans le cadre global du plan de développement du district aussi bien les interventions concernant les prestations que le renforcement du système de santé afin de réduire par exemple les interventions trop ciblées et verticaux.
Le Cameroun pour l’amélioration de la santé de ses populations a opté pour l’atteinte des objectifs du millénaire pour le développement à travers une mise en œuvre des interventions intégrées dans sa stratégie sectorielle de santé. Pour éviter une orientation trop verticale des programmes de santé, la stratégie sectorielle met un accent particulier sur le renforcement du système de santé qui lui-même repose sur le niveau opérationnel constitué par le district santé dont la viabilisation est le gage pour la réussite de ce processus. Ainsi, le district santé est considéré comme une entité unique dont les différentes structures aussi bien publiques, privées et liées à la médecine traditionnelle y exerçant devraient travailler ensemble et se compléter pour la mise en œuvre des différentes interventions. Cette viabilisation signifie donc aussi une certaine délégation des responsabilités au niveau du district de santé ce qui devrait faciliter la collaboration entre les différents partenaires qui ont déjà l’habitude de se côtoyer. Le risque inhérent consiste à une différence de performance entre les différents districts de santé en fonction des ressources de chacun. Aux niveaux intermédiaires et central de veiller à cet équilibre, de mobiliser les ressources aussi pour des régions à risque d’être défavorisées.
Les besoins restent immenses, le défi est grand: maladies infectieuses, maladies chroniques, croissance démographique nécessitant également plus de personnel de santé formé. Cette nouvelle stratégie sectorielle donne aussi la voie à la possibilité de redessiner au moins partiellement la carte sanitaire. Car c’est aux districts de santé de trouver les meilleurs partenaires pour couvrir les besoins de santé de tous.
*Engelbert Manga assume cumulativement les fonctions de médecin chef du district santé de Mfou (Cameroun) et du chef de projet pour la coopération Cameroun-Jura-Suisse, un projet d’appui à la mise en œuvre des soins de santé primaires dans 8 districts de santé dans la province du Centre au Cameroun. Titulaire d’un doctorat en médecine du Centre Universitaire des Sciences de la Santé (CUSS) de Yaoundé (Cameroun) et d’une maîtrise en santé publique de l’IMSP de Genève (Suisse), il aIl est doté d’une longue expérience en matière de santé publique. Il dispose de très bonnes connaissances dans le domaine de Soins de Santé Primaires et notamment du système de santé camerounais et a participé activement à la révision de la stratégie sectorielle de santé du Cameroun. Contact: e.manga@gmx.net.
*Beat Stoll est médecin de santé publique à l’Institut de médecine sociale
et
préventive de l’Université de Genève et membre du comité de Medicus Mundi
Suisse. Contact: beat.stoll@medecine.unige.ch.