Von Andréa Rajman
Les personnes qui tombent malades ont besoin du meilleur traitement médical possible. Nous savons en effet que les traitements médicaux sauvent des vies. Toutefois, les maladies ne sont pas en premier lieu la conséquence de l’absence de traitements. La maladie a souvent pour origine des discriminations et des inégalités sociales et elle est donc influencée par des facteurs extérieurs au système de santé. Par exemple, les conditions de vie et les conditions de travail, ainsi que des facteurs sociaux, politiques, environnementaux ou économiques exercent une influence capitale sur la naissance de maladies. On peut encore mentionner qu’un grand nombre de recherches ont été consacrées pendant de nombreuses années à l'approfondissement des connaissances sur la manière dont les inégalités structurelles et sociales (les déterminants sociaux de la santé) peuvent favoriser l'apparition de maladies. Toutefois, d’autres déterminants influent également sur la santé d’un individu.
Les déterminants économiques de la santé sont moins connus en raison d’une moindre attention portée, malgré le fait qu’ils sont davantage débattus depuis la pandémie de Covid-19. En effet, celle-ci a par exemple, rendu visible les inégalités dans l’accès aux vaccins au niveau mondial. Les déterminants commerciaux de la santé comprennent les stratégies et les approches que le secteur privé utilise pour commercialiser ses produits sans tenir compte des conséquences sur la santé de la population.
En effet, les produits malsains de certains secteurs industriels (tabac, alcool, industrie alimentaire) sont particulièrement néfastes, car ils sapent délibérément les politiques de santé, y compris les lignes directrices de l'OMS, souvent au profit d'intérêts commerciaux. Voir l’article de Viviane Luisier.
Les différentes contributions dans ce bulletin abordent, d’une part, les différents défis auxquels est confrontée la coopération internationale en matière de santé dans ce domaine et, d’autre part, les nouvelles stratégies et approches permettant de lutter contre les inégalités.
Cette première partie aborde plus particulièrement les stratégies et les actions pour renforcer l’équité en matière de santé.
L’article de Nicole Valentine (WHO) mentionne trois déterminants sociaux comme éléments clés : la fonction de la santé publique, l’accès à la santé et le soutien de la communauté. Elle explique, entre autres, comment les services de santé, surtout à un niveau local et les soins de santé primaire sont primordiaux et qu’ils doivent être accompagné par une approche intersectorielle en incluant une collaboration de tou∙tes les acteur∙ices en matière de santé, un management local, ainsi que la participation communautaire.
Dans son article, Remco van de Pas analyse le rapport du « The Lancet-University of Oslo Commission on Global Governance for Health » publié il y a une dizaine d’année et qui identifie sept domaines d’actions politiques qui affectent la santé et qui requièrent une meilleure gouvernance globale et relève cinq dysfonctionnements dans la persistance des inégalités. L'auteur constate de manière critique que le rapport fait l'impasse sur des menaces mondiales importantes et qu'il n'évalue pas correctement les signes des temps qui, selon lui, exigent un nouvel ordre politique mondial.
Dans son article, A.H. Monjurul Kabir rappelle que la pandémie de Covid-19 a révélé au grand jour les disparités en matière de santé et fait ressortir la nécessité d’une santé équitable dans le monde. Il émet quelques recommandations pour mieux lutter contre cette inégalité dans le domaine de la santé en insistant sur une approche intersectorielle et coordonnée, pour un système de santé inclusif et pour une meilleure connaissance du handicap ce qui permettrait de mieux lutter contre les stéréotypes et la discrimination dans les soins de santé.
L’exemple de Tania Séverin sur l’inégalité en matière de santé dans le domaine des maladies cardiovasculaires et le paludisme montre comment il est possible de casser les barrières pour obtenir une meilleure équité en santé.
Dans son article Ann Aerts s’intéresse aux nouvelles technologies de l’intelligence artificielle (IA) qui se profilent de plus en plus comme source de conseil et d’informations pour les patient∙e∙s en particulier pour les populations dont l’accès aux soins est entravé par de multiples barrières. Elle souligne les avancées de l’IA dans les maladies cardiovasculaires qui permettent d’identifier les déterminants de la santé qui caractérisent les populations à risque, de quantifier leur impact et d’identifier les facteurs d’inégalité par exemple.
Afin d’agir pour une meilleure santé et une vie plus sécurisée dans un milieu urbain, Susanna Hausmann et al. insistent sur une approche locale, collaborative et participative tout en en incluant les jeunes. En effet, la sécurité est un facteur déterminant de la santé.
Helen Prytherch et al. illustrent leurs propos par l’exemple de la Moldavie, un pays essentiellement rural. Les auteu∙rices insistent sur le besoin d’une approche intersectorielle et locale pour les interventions en matière de maladies non transmissibles afin d’améliorer la santé et le bien-être de la population.
Adelia Soaroby et Or Salama montre comment Enfants du Monde a développé une formation pour sensibiliser le personnel de santé aux inégalités. A la fin de la formation, les participant∙e∙s devraient pouvoir prendre des mesures dans leurs centres de santé afin de réduire les obstacles à la santé.
Dans son article, Rapahële Catillon, rend compte du besoin d’une vision holistique pour promouvoir une santé mentale optimale. Elle souligne que placer la personne et ses besoins au centre du système de santé est indispensable. Sont également important la participation sociale et le soutien communautaire tout en incluant le droit des personnes handicapées.
Joselyne Rivera et Stephania Parracchini insistent sur la nécessité de soins holistiques en matière de santé sexuelle et reproductive et les droits associés pour améliorer l’égalité des chances en matière de santé pour les femmes.
Les autrices Manon Duay et Andréa Rajman se sont penchées sur l’influence des déterminants sociaux de la santé mentale en s’appuyant sur différents articles et références qui portent sur cette thématique et sur la nécessité de s’intéresser aux inégalités structurelles.
Bernard Borel souligne que pour la réalisation d’une santé globale et la défense de droits pour l’accès à la santé, l’appropriation du sujet par la population locale est centrale. Pour lutter contre la pauvreté et les inégalités sociales, le soutien aux communautés passe, par exemple, par la formation de promoteur∙ices bien ancrés localement. La justice sociale et la solidarité sont également essentielles pour y parvenir.
Dans son article, Paul Schneider présente l’association MASM (Médecins-action-santé-migrants) qui se mobilise pour la défense et le respect des droits humains pour les migrants, en conformité avec la déontologie médicale et le droit international humanitaire. Il relève les défis liés à la migration.
Les autrices Manon Duay et Neslie Nsingi présentent une petite association fribourgeoise et active en Suisse romande (ProSam) et comment celle-ci peut participer à agir sur certains déterminants de la santé mentale.
nous comprenons de mieux en mieux l'impact des déterminants socio-économiques, politiques et environnementaux sur les inégalités de santé, mais il nous faut encore approfondir nos connaissances et nos actions pour favoriser une justice sociale susceptible d'aboutir à une meilleure équité en matière de santé. En effet, la justice sociale est un élément clé pour développer des actions et des stratégies de santé publique efficaces.